Grégory Cuquel and Blanka Gómez de Segura

brou brou brou ha ha brou ha ha,

artistic residency JOANGI, uhart-Cize

11.10.20 — 13.12.20

 

La province de l’Alava, en Pays basque espagnol a longtemps accueilli de nombreux potiers. L’argile y existe par la présence des lacs mitoyens. Utilisée par les potiers des alentours pour produire des formes utiles, les céramiques de la région se caractérisent par leur couleur rouge et leur émail blanc en partie haute. Brou, brou, brou, ha, ha, Brou, ha, ha (1) s’attache à raconter l’histoire d’un territoire et d’un savoir-faire ancestral. En réunissant un passeur de gestes - rigoureux - Blanka Gómez de Segura, et un compositeur de formes - aux mains sales - Grégory Cuquel, les pièces réalisées renouent avec un art de tous les jours qui navigue entre usage et contemplation.

L’exposition prend pour socle l’histoire de pots et de contenants alimentaires, abrités par l’enceinte du musée de la céramique basque d’Ollerias, dont les formes imperturbables depuis le XVIIème siècle, ont été soigneusement répétées. Blanka Gómez de Segura en assure la conservation, la transmission et la production, fidèle aux traditions enseignées par le dernier maître potier de la région, José Ortiz de Zarate Garmendia.

Affranchi des contraintes utilitaires, Grégory Cuquel anime ces objets d’expressions faciales aux émotions diverses – colère, surprise, peur. Fabriqués au tour par les mains sûres de Blanka Gómez de Segura, Grégory Cuquel, lui ajoute l’hésitation, l’accident et les allers-retours, comme pour réintroduire du sentiment aux choses. “Dans le monde il y a des mots qui sont insuffisants et que j’aide à ma façon en fabriquant des objets.“ (2) disait Erik Dietman. Griffures, superposition d’émail et d’images, les pots-visages de son monde dessiné sortent du papier pour devenir entiers - et si vous les approchez, ils se mettront peut- être à chanter : “Brou, brou, brou, ha, ha, Brou, ha, ha.” (1)

Bavardages domestiques entre objets de terre et œuvres sur papier, les pièces à vivre de la maison de Jean Idiart, le propriétaire des lieux, offrent des terrains de discussions inhabituels. Dans la cuisine, les pots sont dressés. Par endroit, des morceaux de paysage, dessinés et collés sur papier, souvenirs désordonnés de rivières et de champs qui avoisinent la maison, poétisent l’espace et assouplissent les murs.

Brouhaha collectif, ce projet a été initié durant le confinement. Il ouvre la voie d’un savoir-faire circulaire et égalitaire construit sur un schéma d’apprentissage et de proximité. À l’encontre des productions de masses néo-libérales, il nous rappelle l’importance du territoire, la force du sensible et nous montre la faisabilité de nouveaux modèles de productions et de diffusion à travers une démarche éco-sociale favorable à l’évolution de nos sociétés.

Commissariat d’exposition et texte Anne-Laure Lestage

(1) Farce du Savetier, XVIème siècle : « Audin : Je prie à Dieu que le grant dyable Te puisse emporter. Le curé, habillé en dyable : Brou, brou, brou, ha, ha, Brou, ha, ha. Audin : Jésus, Notre-Dame ! Le Grant dyable emporte ma femme » source : cnrtl. (2) Erik Dietman, entretien avec Bernard Lamarche-Vadel, dans Réflexions sur la sculpture moderne, Rennes, La criée centre d’art, 1986.

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Un projet organisé par l'association la réciproque avec le soutien de l’association d’art contemporain COOP, à découvrir au sein de la résidence d’artistes JOANGI.